Le Deal du moment :
Réassort du coffret Pokémon 151 ...
Voir le deal

  •  :: Bâtiments du Domaine :: Le Bâtiment Principal :: Aile publique
  • Aller à la page : 1, 2  Suivant
    [Salle de Musique] Bis repetitas
    Lun 28 Oct - 9:36
    Odysseus
    Odysseus
    217
    [Salle de Musique] Bis repetitas X5ed
    43 ans
    Baguette, artefacts et enchantements
    Sang mêlé
    Nirimage
    Elemagie (Air)
    Instructeur
    https://rementor.forumactif.com/t109-odysseus-instructeurhttps://rementor.forumactif.com/t136-dans-la-pensine-d-odysseus
    Assit au piano, j’écoute le temps défiler au rythme de mes doigts. Les touches à présent offrent un son supportable. C’est le mieux que je pourrais faire sans accordeur professionnel. J’aime bien cette imperfection, elle donne une personnalité à l’instrument, au-delà de l’odeur de poussière qui se dégage de sa vieille carcasse. J’attends.

    Pivoine s’est montrée assidue, malgré les cours, la fatigue, les rumeurs et toutes ces choses qui perturbent le quotidien. De mon côté, j’ai fait attention à être aussi là que possible, lorsque mon compagnon n’avait pas besoin de moi. Il passera toujours en premier et elle le sait. Sa voix est jolie et maintenant qu’elle travaille, elle écorche moins les hautes sphères. Petit à petit, elle laisse le souffle prendre sa place dans son abdomen, le son tourner dans sa bouche avant de passer doucement la barrière de ses lèvres. Chanter est une forme de musique. Le corps devient un instrument et tout compte. Lorsque l’on étudie la technique, l’on se rend compte que c’est le cas pour tous les vents, toutes les cordes. La position fait partie du jeu. Elle a un impact. La porte s’ouvre. Je ne m’interromps pas. Sa place est prête, faite d’un gros pouf de couleur chaude redressé pour lui donner un soutien correct au niveau du dos. Je l’ai vu avec Lancelot. Il a autre chose à faire que de soigner des torticolis. En dessous j’ai mis un tapis de laine. Je n’ai jamais aimé les chaises. On est tellement mieux quand on peut sentir le sol sous soi et vibrer avec lui. C’est pour cela que j’élimine les matériaux durs. Quand bien même le bois aussi sait répercuter le bruit.

    Je termine ma phrase musicale. Autour de nous, septembre fait rougir ses feuilles. C’est pourtant encore l’été. Je me demande combien parmi les étudiants s’en rendent compte. Puis si cette musique conviendrait pour le Bal. Je ne pense pas. Elle est trop mélancolique pour être dansée. Je n’aime pas les bals. Les pieds et les conversations recouvrent la musique qui n’est que prétexte à une promiscuité. Je me demande si la jeune apprentie chanteuse a hâte et me rappelle qu’elle est là. En silence, j’ôte mes doigts du piano et les pose sur mes cuisses. Puis la regarde.

    « Bonsoir. » Je n’ai pas tellement d’autre choses à dire si ce ne sont les phrases habituelles. « Veux-tu un peu d’eau pour commencer ? » Boire détend la mâchoire et permet de rentrer en soi. On suit le chemin de l’eau, froide, dans le corps, chaud. Gorge, œsophage, puis derrière les bronches et les poumons jusqu’au cœur du corps, l’estomac. On peut aussi parfois en sentir des douleurs à la nuque. « Tu es confortable ? »
    Re: [Salle de Musique] Bis repetitas
    Lun 28 Oct - 14:52
    Pivoine
    Pivoine
    246
    [Salle de Musique] Bis repetitas Badge_noir
    23 ans
    Intelligence
    Sang mêlé
    Demi-Vélane
    Intelligence
    https://rementor.forumactif.com/t182-pivoine-enroleehttps://rementor.forumactif.com/t185-bouquet-de-pivoines
    Ca fait déjà presque deux mois depuis le lac. Deux mois qu'on se voit tous les vendredis, à part un ou deux qui ont sauté et qu'on a rattrapés le dimanche soir suivant. Ca me fait du bien de chanter. J'ai jamais pris de cours de chant, pas l'argent, pas le temps, pas malin de sortir seule. J'avais des bases pas trop mauvaises je crois heureusement, même en ayant jamais eu d'autre entraînement qu'essayer d'imiter les trilles de maman. Elle chantait mieux. Elle faisait tout mieux. Mais je sens mes progrès. C'est sûrement la discipline où je les sens le mieux, même en sachant que c'est pas avec le pouvoir de la musique et de l'amour qu'on va gagner cette fichue guerre.

    J'ai fait bien attention à pas me laisser emporter par la musique depuis le petit dérapage du lac. Ca se passe bien. Il est un peu plus familier, moi aussi, mais seulement là, seulement pour deux heures. Et la porte reste ouverte. Quelques curieux ont passé la tête, une fois ou deux. Je les ai ignorés. Je sais pas s'il les a vus. J'aime bien mon pouf. Il a des couleurs chaudes et profondes et il est confortable. J'aurais cru qu'il me ferait chanter debout, mais non, assise par terre. Ca me va aussi. C'est un peu trop confortable des fois en fait, mais c'est des belles couleurs. Ca me change du bleu Selkie.

    Ce soir comme d'habitude il est arrivé avant moi. Je sais pas à quelle heure il arrive, je suis un peu en avance pourtant. J'entre en silence, je me pose contre mon pouf et j'écoute, les yeux fermés. J'aime bien l'écouter. Il joue toujours des choses tristes, mais il les joue tellement bien. Pas que j'aie la prétention de pouvoir dire qui joue bien et qui joue mal, mais lui ça me parle.

    Je crois que je vais m'endormir. J'ai pas envie d'ouvrir les yeux. C'est confortable. Je suis bien.

    Fausse sécurité. Encore. Toujours. Alors je m'enfonce les ongles dans la main et j'ouvre les yeux avec autant de bonne volonté que si j'étais sous Imperium. J'ai du mal à faire la transition vers le sommeil polyphasique, la seule chose que ça a améliorée pour l'instant c'est ma capacité à m'endormir à peu près n'importe où, n'importe quand, dès que je ferme les yeux. Pour le réveil, c'est pas encore ça. Mais j'y arriverai.

    J'y arriverai.

    "Bonsoir." je réponds quand il me salue. Je me relève par politesse. "Je veux bien de l'eau s'il vous plaît... ou du café si vous avez."

    Je crois pas qu'on ait déjà parlé de l'éventuel effet du café sur les cordes vocales encore. Et j'ai du mal avec l'idée d'utiliser le tutoiement, même dans ma tête. En anglais, par chance, c'est soupe au you pour tout le monde.

    "Bien installée oui, merci. C'est presque trop confortable." je plaisante, mais je sais que j'ai le teint un peu trop éteint, les yeux un peu trop cernés pour ne pas trahir ma fatigue. Ca ira mieux bientôt. "Et vous, comment allez-vous ? C'était joli comme morceau."
    Re: [Salle de Musique] Bis repetitas
    Lun 2 Déc - 15:22
    Odysseus
    Odysseus
    217
    [Salle de Musique] Bis repetitas X5ed
    43 ans
    Baguette, artefacts et enchantements
    Sang mêlé
    Nirimage
    Elemagie (Air)
    Instructeur
    https://rementor.forumactif.com/t109-odysseus-instructeurhttps://rementor.forumactif.com/t136-dans-la-pensine-d-odysseus
    J’ai un très léger sourire. Du café. Bonne réponse. Je hoche la tête. Prend ma baguette, lance un sort à la micro-machine que j’ai posée dans un coin, version rétrécie de celle que j’ai confectionnée pour Lancelot. Le mécanisme enchanté se met en route, j’attrape une tasse de ma main libre et la pose sous le jet qui s’active pour la remplir de liquide odorant. L’odeur de grains torréfiés se répand dans la pièce. Ce que je peux aimer ces saveurs. Elles roulent du nez jusqu’au fond de la gorge, laissant une amertume qui gratte puis disparait. C’est encore pire quand on le boit. J’ai programmé un breuvage fort, amer, profond, d’un noir d’encre. Je n’ai ni lait ni sucre. A la rigueur de l’eau. Je lui tends la tasse, attend qu’elle la prenne et lui sert un verre, au cas où. Pour l’aider je transforme temporairement un tabouret en table basse. Tout le mobilier de la salle de musique a accepté de pouvoir être parfois déformé en échange de quelques morceaux. Aussi, je n’ai plus besoin de demander la permission, et c’est bien comme ça. Je glisse gentiment sur la question sur ma santé. Elle sait que je n’y réponds jamais. Qu’est-ce qu’il y aurait à dire de toute façon. Je ne suis pas mort. C’est ainsi.

    « Une vieille complainte tzigane que j’ai adaptée du violon. » Parce que je n’aime pas cet instrument. J’ai l’impression d’un chat qu’on écorche, de cordes qui pleurent, grattées par l’archet. J’en reconnais l’intérêt, je sais que, bien joué, cela peut être merveilleux. C’est trop souvent mal joué. Au piano, les cris sont étouffés, plus supportables et la douleur, discrète. « Elle est un peu grave pour vous et n’a pas de paroles en anglais mais si vous le souhaitez, je pourrais la transposer et traduire un texte qui conviendrait. » Parce que je parle anglais maintenant, mieux que je le faisais auparavant. Je laisse ma proposition flotter, comme la musique, et reprend. « Commençons par des gammes, voulez-vous ? A moins que vous ne préfèreriez un peu de relaxation pour commencer ? » Je ne plaisante, ni ne me moque. Elle semble fatiguée. On ne chante pas bien quand on est trop tendus. Le café de toute façon ne fera pas effet tout de suite et je préfère qu’elle se repose plutôt qu’elle gâche la musique à cause de son sommeil. On peut toujours reprendre plus tard. Un dimanche. La laissant réfléchir et répondre, je commence déjà à pianoter la complainte deux octaves au-dessus. C’est trop haut pour elle, dans l’état actuel. Je baisse de quelques tons. C’est mieux mais à présent trop majeur. Je rajoute des dièses et des bémols. Ca ne ressemble plus à rien. Je descends ‘d’un demi-ton et recommence. C’est mieux. Puis mes doigts commencent à faire des gammes que j’accompagne de ma voix grave, en attendant soit qu’elle s’endorme, soit qu’elle me rejoigne, soit qu’elle dise quelque chose.
    Re: [Salle de Musique] Bis repetitas
    Mar 3 Déc - 2:41
    Pivoine
    Pivoine
    246
    [Salle de Musique] Bis repetitas Badge_noir
    23 ans
    Intelligence
    Sang mêlé
    Demi-Vélane
    Intelligence
    https://rementor.forumactif.com/t182-pivoine-enroleehttps://rementor.forumactif.com/t185-bouquet-de-pivoines
    Un jour il me répondra. Un jour, il me dira comment il va. En attendant, pas besoin d'avoir fait Ouagadou pour voir qu'il est un peu mort à l'intérieur. Comme d'habitude. Et pourtant, comme ça arrive parfois, il a une vague mimique qui pourrait, quand on arrive à l'attraper, passer pour un sourire.

    Avec un remerciement je me rassois quand le tabouret devient table basse, je le laisse faire le café. Avant même d'avoir mis la main sur la tasse qui arrive, je sais à l'odeur qu'il va être fort. C'est étrange quelque part qu'un homme si... apathique, faute d'un autre mot, prenne son café si corsé. On l'imaginerait aimer des choses aussi fades que lui. Peut-être qu'il a besoin de café fort, de musique triste, pour remplir sa vie. C'est un peu triste.

    "Vous ne prenez rien ?" je m'étonne, les doigts autour de la tasse pour les réchauffer.

    Le café noir sent si fort que c'en est presque écœurant, j'ai un peu peur que mes lèvres fondent si je bois tout de suite. Je vagabonde encore un peu. Peut-être que c'est aussi parce qu'il aime les trucs intenses qu'il a parfois l'air pas totalement indifférent à la présence des Pivoine. La plupart du temps je vaux pas une tasse de soude caustique déguisée en café, mais il y a eu ce moment au lac...

    "Vous me consacrez déjà beaucoup de temps." je commente à mi-voix, en relevant les yeux que j'avais perdus dans la tasse. "Je peux chanter sans paroles, ou phonétiquement. Nous pouvons aussi choisir un autre air. C'est pas ce qui manque." je souris.

    Oh bien sûr, deux heures par semaine c'est pas grand-chose, mais c'est deux heures qu'il passe avec moi et pas avec son fiancé, ses baguettes, ses artefacts, ou même, qui sait, Morphée. C'est un petit nous anodin, glissé comme ça dans une phrase. Un nous qui n'est que lui et moi.

    Et qui sonne vachement bizarre présenté comme ça.

    D'ailleurs il est rigolo, il me pose une question mais il attend pas la réponse pour commencer à trifouiller le morceau qu'il jouait quand je suis arrivée. On va partir sur ça alors. Pendant qu'il cherche la bonne hauteur, tâche où je serais bien incapable de l'aider même si ça me semble atrocement aigu pour mes compétences, je me hasarde à goûter le café. C'est de l'amertume liquide ! Enfin, on dira poliment que c'est intense, pour pas l'accuser d'essayer de m'empoisonner avec du décapant. Et pourtant c'est pas mauvais. Je peux pas, décemment, dire que c'est mauvais. C'est juste... atrocement fort, avec plein d'arrière-goûts en cascade.

    Je crois qu'il a trouvé. J'ai appris à sentir le moment où il attrapait quelque chose qui lui convenait, qui sonnait juste à son oreille et pas seulement à la mienne. Il commence à chanter, je pose la tasse et je me redresse pour suivre le piano. Les premières notes viennent sans difficulté, mais rapidement je sens que ce sera plus compliqué que d'habitude. Ca devrait pas. J'ai rien fait de plus ou de moins que les autres soirs, pourtant je force inutilement, "de travers", ça me fait presque mal à la gorge. Ca m'agresse les oreilles de l'intérieur aussi, pas parce que c'est particulièrement faux je crois, parce que... parce que. Presque comme une migraine qui se pointerait sans crier gare. C'est un jour sans. Ca arrive. Mais il devrait pas y avoir de jours sans. Les Mangemorts, ils s'en foutent de tes jours sans.
    Re: [Salle de Musique] Bis repetitas
    Mar 3 Déc - 12:38
    Odysseus
    Odysseus
    217
    [Salle de Musique] Bis repetitas X5ed
    43 ans
    Baguette, artefacts et enchantements
    Sang mêlé
    Nirimage
    Elemagie (Air)
    Instructeur
    https://rementor.forumactif.com/t109-odysseus-instructeurhttps://rementor.forumactif.com/t136-dans-la-pensine-d-odysseus
    Je secoue la tête. Je ne prends rien. Ce n’est pas par manque d’envie. Les potions de Lancelot enlèvent le besoin mais je n’ai jamais été très physiquement accroc. C’est moi qui veut m’évader. Oublie mes soucis. Revoir les couleurs de la musique. Me laisser porter par des histoires sans mots, des mots sans sens. Tout ce qu’il me reste, c’est la caféine et le travail. Les deux sont étroitement surveillés, bien entendu. Je pourrais tenter d’atteindre un état second par manque de sommeil aussi. Seulement je ne serais plus apte à enseigner ou créer, et…je n’ai pas envie de décevoir. Le Domaine est un endroit où je me sens aussi bien que je le peux. J’aime me dire que mon travail paye mon écot.

    Je hausse les épaules. Du temps, j’en ai. Les instructeurs n’ont qu’un à deux cours par jour, le reste étant partagé entre la préparation des leçons, la correction des exercices et nos activités spécifiques. Pour moi, la création des baguettes et des artefacts du domaine. C’est rempli, c’est vrai. Pour autant, c’est flexible. Rien ne m’empêche de travailler toute une nuit et de dormir toute une matinée pour rattraper. D’autant plus que, les cours mis à part, j’apprécie ce genre d’activité et que donc le temps, pour moi, ne compte pas.

    « Je ne vous consacre rien. Mon temps ici est à disposition de ceux qui en ont besoin. » et je préfère mille fois l’occuper avec de la musique qu’à réparer les bêtises d’un enrôlé qui se serait amusé à détruire un arbre ou voler dans les réserves d’ingrédients pour se lancer dans ses propres expérimentations. La recherche de la bonne musique m’aide à me détendre un peu. Cela n’engage à rien. J’ai cette mauvaise habitude d’avoir besoin de toujours aller au bout des choses. Maintenant que j’ai parlé de transposer, je dois le faire. Elle ne m’interrompt pas et j’apprécie cette délicatesse. J’ai menti, un peu. Cela m’arrive. Si mon temps est en effet à disposition, j’apprécie ces moments avec quelqu’un qui sait parler quand il le faut, se taire quand j’en ai besoin, et chanter si c’est le sujet. Elle me rappelle Arcturus, dans cette acceptation du silence qu’elle a.

    Je commence à chanter. Elle me rejoint. Elle essaie, je l’entends, mais c’est atrocement forcé. Elle travaille mieux que ça, d’habitude. Je ne veux pas la bousculer. J’attends un moment qu’elle se soit échauffée, sans amélioration notable. A la fin d’un exercice, finalement, je m’arrête, pose mes mains sur mes genoux, la regarde.

    « Il y a quelque chose au fond de votre gorge, ce soir. Buvez entièrement le verre d’eau, redressez-vous bien. Est-ce que quelque chose vous pèse ? » Je l’observe avec plus d’attention que d’habitude, tentant de repérer si elle est rigide, si elle a un nœud dans le dos, ou quoi que ce soit qui pourrait l’avoir désaccordée. Parce que c’est ce qu’elle est. Et je ne suis pas certain d’avoir les outils ou les connaissances pour accorder un être humain
    Re: [Salle de Musique] Bis repetitas
    Mar 3 Déc - 15:19
    Pivoine
    Pivoine
    246
    [Salle de Musique] Bis repetitas Badge_noir
    23 ans
    Intelligence
    Sang mêlé
    Demi-Vélane
    Intelligence
    https://rementor.forumactif.com/t182-pivoine-enroleehttps://rementor.forumactif.com/t185-bouquet-de-pivoines
    Il me consacre deux heures par semaine, et ces deux heures il était pas enchanté de me les consacrer, au départ. Je crois que ça a un peu changé. J'espère. Je voudrais pas ajouter l'ennui à l'indifférence. C'est deux heures pendant lesquelles il me donne des conseils en tout cas, et qu'il estime ou non que c'est rien, il est pas obligé. Au bord du lac il m'a déjà indiqué les stratégies par lesquelles il pensait que j'aurais pu lui signifier que je l'agaçais, autrement dit les stratégies auxquelles il a pensé pour avoir la paix, et aider à s'améliorer n'en faisait définitivement pas partie.

    Le fait est qu'aujourd'hui, on dirait pas qu'il me donne des cours de chant deux heures par semaine depuis deux mois. C'est tout juste médiocre et en plus j'ai l'impression que quelque chose s'enraie. Ca lui a pas échappé, évidemment.

    Évidemment.

    J'obéis. Quand je lève le verre, je me rends compte qu'il me regarde comme... comme s'il me regardait, en fait. Pas comme d'habitude où il a l'air de se contenter de me voir. Je relève pas, je bois, je me redresse.

    Est-ce que quelque chose me pèse ? Non, trois fois rien. Les cours, les devoirs, mon sommeil qui se régule pas comme je veux et qui me transforme gentiment en zombie, Granit, Ardoise, le bal. Pour ne parler que des trucs relativement précis, ponctuels. Tout n'est qu'ordre et beauté, luxe, calme et volupté, comme disait l'autre.

    "Rien de particulier non."

    J'hésite à poursuivre, je me laisse le temps de poser le verre pour réfléchir. Je devrais pas parler. Tout ce que je dis peut être entendu, répété. Déformé. Amplifié. Au moins répété. Même sans parler des oreilles baladeuses et des meubles bavards, je suis assez intelligente pour me douter que fiancés d'intérêt, d'amour ou de force, il a plus de chances de tout répéter au Médicomage que de tout garder pour lui. Et ce type... enfin passons.

    "Je..." ...hausse vaguement les épaules, je le regarde plus franchement. "...suis un peu fatiguée, je dois dire. J'essaie de prendre un peu d'avance sur mes lectures et sur mes devoirs à rendre pour pouvoir profiter du bal." Je souris doucement, un peu comme aurait fait Cassiopeia qui oserait pas montrer trop fort qu'elle est toute contente. "Il s'annonce magnifique. Je voudrais être à la hauteur et vous faire honneur à tous les deux."

    En insinuant que le bal leur est dédié, à Lancelot et lui, j'espère susciter une réaction qui pourrait m'en apprendre plus. Parce que pourquoi ils ont organisé ce bal, en vrai, j'en sais foutrement rien. On a eu aucune raison officielle, et une annonce de mariage est bien la seule chose pas trop inquiétante mais justifiant un bal qui me soit venue à l'esprit. Vu la fixette affichée du Directeur sur les fiançailles des deux instructeurs, ça pourrait même avoir une forme de logique.

    Evidemment, je m'attends pas à ce que ça soit aussi simple. Il a pas tout à fait le même rapport à l'information que quelqu'un d'autre de ma connaissance, le dirlo.
    Re: [Salle de Musique] Bis repetitas
    Mer 4 Déc - 16:18
    Odysseus
    Odysseus
    217
    [Salle de Musique] Bis repetitas X5ed
    43 ans
    Baguette, artefacts et enchantements
    Sang mêlé
    Nirimage
    Elemagie (Air)
    Instructeur
    https://rementor.forumactif.com/t109-odysseus-instructeurhttps://rementor.forumactif.com/t136-dans-la-pensine-d-odysseus
    Ils disent toujours non. Ou « ça va ». Ou « Tranquille ». Ou toute autre expression à la mode qui sert de masque pour ne pas avouer vraiment comment on va. Je préfère ne pas répondre à la question, je trouve ça plus honnête. Mais je sais que, parfois, le non du début n’est qu’une défense et que l’être humain déteste trop le silence pour ne pas être tenté d’élaborer. Du coup, je reste silencieux, sans musique, juste attentif. Elle boit le verre d’eau. J’aimerais dire que ça lui redonne des couleurs mais j’en serais incapable. Elle est aussi blanche qu’une toile non peinte même si elle a plein de choses au revers. Comme prévu, elle reprend. La fatigue. Peut-être. Elle avait l’air prête à s’endormir tout à l’heure. J’avais proposé de ne pas faire cours pour éviter ce qui était finalement arriver. Gâcher de la musique. Son sourire timide montre son ravissement au sujet du bal. Au moins une autre que ça amuse. Lancelot semble, lui aussi, très heureux de l’occasion. Je n’aime pas vraiment les bals.

    C’est la conclusion qui me surprend. Je crois que cela se voit tout comme mon coup d’œil derrière moi pour tenter de voir quel est le deuxième. Personne n’est visible. Je retourne mon visage vers elle.

    « Quel honneur ? A qui ? » Si elle sait des choses sur le bal, peut-être que cela intéressera mon compagnon. Ou pas. Tout ce que je sais personnellement c’est que c’est une initiative de Monsieur le Directeur, que c’est obligatoire et que je devrais ouvrir la danse avec Lancelot. Doucement, la lumière se fait dans mon esprit. J’ai du mal à croire que certains puissent tomber dans le panneau de la relation amoureuse entre le médicomage et moi. Enfin. « Oh. Vous voulez parler de mon compagnon ? Ce bal n’est pas en notre honneur ou, si c’est le cas, nous n’avons pas été prévenus. »

    Il y a toujours plusieurs raisons poussant Monsieur le Directeur à faire ce qu’il fait. Des raisons que je sais réfléchies et auxquelles je ne pense pas, pour la plupart. Si j’y réfléchissais, je pourrais en trouver plusieurs au « bal ». Seulement à quoi bon. Savoir ou ne pas savoir ne changera rien à la réalité, à savoir que j’allais devoir danser la valse en public, comme un vulgaire danseur. Je hausse les épaules.

    « Dans tous les cas il ne faut pas vous épuiser en préparation. Tout le monde y est convié aussi il n’y a pas de raison pour que vous ayez moins de sommeil que vos camarades. » Je fais le professeur. Cela m’ennuie. Je n’y crois pas à ces bêtises. Ne sont-ils pas sensés être assez adultes pour se réguler d’eux-même ? « Et puis l’on n’apprend pas bien quand on est fatigué. Le corps est un instrument. Si vous tirez trop sur une corde, vous n’aurez pas le son voulu, c’est physique. Et au final, elle casse. Imaginez tout le temps de travail à rattraper que vous aurez si vous perdez trois jours, une semaine pour épuisement ? »
    Re: [Salle de Musique] Bis repetitas
    Mer 4 Déc - 19:45
    Pivoine
    Pivoine
    246
    [Salle de Musique] Bis repetitas Badge_noir
    23 ans
    Intelligence
    Sang mêlé
    Demi-Vélane
    Intelligence
    https://rementor.forumactif.com/t182-pivoine-enroleehttps://rementor.forumactif.com/t185-bouquet-de-pivoines
    Si j'étais pas aussi concentrée malgré la fatigue, je crois que j'aurais pu rire franchement de son air surpris et de le voir se retourner, chercher derrière lui à qui est-ce que je pouvais bien parler. Là, je suis juste concentrée, fatiguée et un brin inquiète, et sa réaction n'arrange pas vraiment ma pâleur. Je le sens. Il sait rien. Ou alors il fait vraiment très bien semblant. Pas besoin d'attendre la réponse, du coup, pour savoir qu'au bon moment, j'aurai l'air incrédule et surprise à mon tour.

    "Ah bon ? Je suis désolée, je croyais... je ne voyais pas d'autre raison. Mais vous dites que même vous vous ne savez rien ?"

    J'en vois des tas, d'autres raisons. J'en vois beaucoup trop. J'en vois aucune qui m'enchante. Au mieux, on va encore faire des choses dans notre dos, sans nous tenir au courant de rien. Au pire, au pire...

    ...au pire il a pas tort, si je m'effondrais et que je devais rattraper une semaine entière de boulot... oh l'horreur, je veux même pas y penser. Alors je chasse l'idée d'un coup de balai mental. Je veux pas y penser, alors j'y pense pas, c'est tout. C'est pas au programme. Pour l'instant tout tient à peu près. Ca tiendra bien jusqu'au bal, non ? Mais oui que ça tiendra. Et puis ça tiendra après, aussi, parce qu'il faudra bien.

    Sauf que quelque part je commence à me dire que "il faudra bien", c'est pas toujours suffisant comme raison. Je baisse un peu le nez.

    "Vous avez raison."

    Les yeux aussi. Même avec toute la mauvaise foi du monde, difficile de lui donner tort. Ou alors en disant que de toute façon je dors déjà moins qu'eux, parce que les insomnies, parce que j'ai décidé de les transformer en un rythme complètement décalé et très fractionné et que pour l'instant ça marche pas encore très bien. Mais dire ça, ça reviendrait à lui dire encore une fois que j'ai des problèmes de sommeil et je vais finir par me retrouver avec son fiancé sur le dos, et ça j'ai pas envie, mais alors pas du tout. Il est lourd, son fiancé, et pas seulement au plan purement physique.

    "Je veux pas vous inquiéter vous savez."

    J'ai relevé les yeux. Et je me rends compte en le disant que c'est un mensonge. Je veux que quelqu'un s'inquiète pour moi. Et je sais que si je veux que quelqu'un s'inquiète pour moi, c'est pas à lui qu'il faut demander. Il s'inquiète probablement plus pour le piano que pour moi. Il est désaccordé, lui aussi.
    Re: [Salle de Musique] Bis repetitas
    Ven 6 Déc - 14:46
    Odysseus
    Odysseus
    217
    [Salle de Musique] Bis repetitas X5ed
    43 ans
    Baguette, artefacts et enchantements
    Sang mêlé
    Nirimage
    Elemagie (Air)
    Instructeur
    https://rementor.forumactif.com/t109-odysseus-instructeurhttps://rementor.forumactif.com/t136-dans-la-pensine-d-odysseus

    Je hausse les épaules. La jeunesse a besoin de tout contrôler, cela la rassure. Moi je sais que, dans ma vie et même après, je ne peux rien faire contre la plupart des choses. Alors je ne me pose pas de question. C’est moins fatiguant comme ça. Et au pire, on meurt. Et alors ? On y arrive tous à un moment ou à un autre.

    « Monsieur le Directeur a ses raisons. Je suis certain qu’il vous les expliquera en temps voulu. » C’est un vous pluriel. Vous les enrôlés. J’aurais dû dire nous, quand j’y pense. C’est trop tard. Tant pis. C’est curieux quand même. L’on aurait pu croire qu’une fête ravirait les jeunes adultes et Pivoine semble plus angoissée qu’autre chose. Que craint-elle, vraiment ? Elle est plus en sécurité ici qu’elle ne l’aurait été partout ailleurs dans le monde.

    « Peut-être veux-t-il fêter quelque chose que l’on ignore, peut-être pense-t-il que nous avons besoin d’une respiration dans le rythme des cours, peut-être en profitera-t-il pour faire un discours… » je ne termine pas mon énumération et hausse à nouveau les épaules. Quelle importance les raisons d’un tel événement ? Il y en a, c’est certain. Monsieur le Directeur ne fait rien sans rien et s’il peut éviter de faire de la gentillesse, il le fait. Cela ne fait pas de lui un traitre comme dans les tragédies anciennes. Un Néron ou un Borggia. Je fais venir à moi le verre d’eau et le remplit à nouveau depuis le pichet près de moi. Elle a tout baissé. Dos rond. J’ai raison je sais. J’attends, elle a une voix de petite fille. Lorsqu’elle relève les yeux, je lui rend son regard. Je souris presque. Pauvre petite souris. Elle s’y prend bien mal.

    « Vous n’êtes plus entourée d’ennemis ici. Vous pouvez penser à vous ouvrir un peu, à exprimer lorsque cela ne va pas. Cela ne fait pas de vous quelqu’un de faible. Les autres aussi, vous savez, ont des difficultés. Pas les même. Qui ne s’expriment pas de la même façon. Mais nous tous ici avons vécu des faits et des horreurs qui nous ont fait nous refermer. » Je soupire. Moi moins que les autres. Je ne devrais pas être là. Je suppose que les baguettiers nirimages sont rares. Je continue à la regarder. Pour de vrai. J’essaie de ne pas penser à ma sœur. Et pourtant.

    « Je serais beaucoup plus inquiet si vous vous évanouissez d’épuisement que si vous me disiez que ça ne va pas trop, que vous préférez dormir voire utiliser ces deux heures pour dormir avec de la musique. Je ne suis pas un bourreau, je peux l’entendre. Et si vraiment vous êtes épuisée, l’infirmerie peut vous aider à vous reposer dans un endroit à part. Certes, ça ferait des cours à rattraper mais, encore une fois, moins qu’un véritable burn-out. Ne vous fanez pas trop vite, Pivoine. »
    Re: [Salle de Musique] Bis repetitas
    Ven 6 Déc - 17:54
    Pivoine
    Pivoine
    246
    [Salle de Musique] Bis repetitas Badge_noir
    23 ans
    Intelligence
    Sang mêlé
    Demi-Vélane
    Intelligence
    https://rementor.forumactif.com/t182-pivoine-enroleehttps://rementor.forumactif.com/t185-bouquet-de-pivoines
    Non, c'est pas des raisons valides. Il a pas besoin de prétexter un bal pour faire un discours le dirlo, on l'a déjà vu.

    Il y a quelque chose qui passe dans les yeux du Baguettier avant qu'il reprenne la parole. Ca part trop vite pour que j'arrive à l'attraper.

    Il dit des choses communes, consensuelles. Qu'il n'y a pas d'ennemis ici. Je sais. Je le croyais, je l'espérais, et puis l'autre tache humaine de Granit a disparu sans la moindre explication, quand on a pas eu carrément des demi-menaces si on cherchait à en savoir plus. Non. Il y a peut-être pas d'ennemis, mais y a clairement pas que des alliés. Et même les alliés sont de circonstance, intéressés, passifs, indifférents.

    Je préfère me demander dans quelle mesure les bribes de sa propre humanité qu'il effleure au passage sont une invitation, un besoin qu'il aurait lui aussi. C'est clair qu'il a souffert, cet homme. Ou qu'il a une araignée au plafond. Ou les deux. C'est tout aussi clair que s'il devait en parler à quelqu'un, ça serait pas à moi. Pas maintenant. Si je devais nommer quelqu'un, je tablerais plutôt sur son Médicomage de fiancé de façade. Ou Morrigan. Après tout, lui, pour autant que je sache, il a pas de cours de torture avec elle, on attend pas de lui qu'il raconte sa vie à un bourreau.

    Il s'inquiète.

    Il s'inquiète.

    C'est pas dit comme ça mais ça me serre la gorge. C'est comme s'il avait lu mes pensées alors que je sais que c'est tellement plus douloureux.

    J'aurais pas dû laisser la faille ouverte. Parce que j'ai envie d'y croire, qu'il s'inquiète. Pour moi. Juste pour moi, rien que pour moi. Comme maman et peut-être Aurèle ont été les seuls à le faire. Pas juste parce que je serais un mouton du troupeau, une tête d'épingle fragile dans le réseau. Parce que je serais importante.

    A qui est-ce qu'on essaie de faire croire ça ?

    "Je vais pas me faner." je murmure.

    C'est une certitude résignée plus qu'une promesse. On aura pas le temps. Je crèverai avant, je le sais. Ici ou ailleurs, pour avoir le droit d'exister.

    "J'ai encore des choses à faire." Comme des devoirs, par exemple, ou faire tomber ces consanguins de merde qui croient qu'ils dirigeront toujours le monde. "Mais je crois qu'aujourd'hui j'aurai du mal à travailler les aigus. Je suis désolée."

    J'attrape le pouf derrière moi, je l'enserre, je pose le menton dessus comme une gamine sur son oreiller. Définitivement pas une position pour chanter, ni pour grand-chose d'autre d'ailleurs.

    "J'ai toujours la fleur en papier que vous m'aviez donnée, vous savez ?"

    Elle est dans le tiroir de ma table de nuit avec quelques autres trucs jolis mais inutiles. Mais si c'est pour parler du contenu du tiroir de ta table de nuit avec ton prof d'artefacts, enchantements et musique, franchement, autant te taire et le laisser jouer comme si t'étais pas là.
    Re: [Salle de Musique] Bis repetitas
    Lun 9 Déc - 16:37
    Odysseus
    Odysseus
    217
    [Salle de Musique] Bis repetitas X5ed
    43 ans
    Baguette, artefacts et enchantements
    Sang mêlé
    Nirimage
    Elemagie (Air)
    Instructeur
    https://rementor.forumactif.com/t109-odysseus-instructeurhttps://rementor.forumactif.com/t136-dans-la-pensine-d-odysseus
    Elle le dit mais n’y croit pas. Du moins c’est ainsi que je l’entends. Comment peut-on assurer de quelque chose d’ici important d’une voix aussi peu audible et se croire crédible ? Impossible. Elle est en bonne voie pour manquer d’air, de soleil et de vent. De ce qui est nécessaire à une fleur pour garder la douceur de ses pétales. Que dois-je dire ? Ce n’est pas ma sœur et, même elle, je n’ai rien pu faire pour éviter qu’elle soit fauchée dans la fleur de l’âge. Pourquoi s’ouvre-t-elle à moi ? Pourquoi me fait-elle confiance ? Ne sent-elle pas que je n’en suis pas digne ? Et d’un autre côté, puis-je repousser cette main qu’elle ne semble pas vouloir tendre aux autres ? Peut-être devrais-je en parler avec Morrigan. Mais la celte me fait peur. Son sourire est trop lumineux pour moi. Il me fait mal. C’est quelqu’un de bien, je n’en doute pas, seulement, je suis trop lâche, comme d’habitude.

    C’est toujours pareil lorsque je m’implique. Je me retrouve coincé dans des questions, dans des impasses. Je suis plus heureux à ne pas me mêler de la vie des autres, ou même de la mienne. C’est une existence solitaire mais au moins sans plus de douleur que celles que je porte en moi.

    « Les aigus peuvent attendre. » A quelqu’un d’autre, j’aurais pu froncer les sourcils, mettre un ultimatum. Seulement, je vois bien qu’elle est honnêtement épuisée et elle a mieux à faire, à apprendre que la musique. Elle doit défendre la Cause. Celle qui faisait briller les yeux de ma femme. Celle qui fait que je suis ici. Contrairement à beaucoup des autres instructeurs, je n’en suis pas fanatique. Le monde actuel est affreux. Il tue sans discrimination ceux qui tombent sous la baguette des fous au pouvoir. J’en suis conscient. Est-ce à dire que nous ferons mieux ? Je n’en suis pas sûr. Trop souvent, la haine conduit à la haine. Il suffit de se rappeler des guerres gobelines. Je soupire. Lève un sourcil, surpris.

    « Vraiment ? Tant mieux. » Je n’avais jamais pensé à ce qu’elle ferait de mon exemple de Pivoine. Je crois que je n’aurais pas aimé qu’elle le jette, en y réfléchissant. Je commence à jouer une vieille berceuse grecque au piano, presque sans y penser. « Aviez-vous des fleurs, là où vous étiez ? Pouvez-vous m’en décrire une ? » J’essaie de la reposer sans l’endormir, que son esprit repense a des choses heureuses, si elle en a, aidée par une musique légère et répétitive pour l’y accompagner. Se ressourcer repose souvent plus que le sommeil lui-même. S’allonger une heure et penser, et ne pas laisser l’avant, l’après ou le maintenant déranger cette méditation. Moi, je transforme mon esprit en courant d’air et je l’envoie explorer des mondes imaginaires ou aperçus. Je me refais les plaines de far ouest, les beautés de l’Afrique, les terres sauvages scandinaves ou la mer bleue de mon pays. Il n’y a jamais d’humains dans mes rêveries. Ils gâchent toujours tout.
    Re: [Salle de Musique] Bis repetitas
    Mar 10 Déc - 1:42
    Pivoine
    Pivoine
    246
    [Salle de Musique] Bis repetitas Badge_noir
    23 ans
    Intelligence
    Sang mêlé
    Demi-Vélane
    Intelligence
    https://rementor.forumactif.com/t182-pivoine-enroleehttps://rementor.forumactif.com/t185-bouquet-de-pivoines
    Il comprend. Ou il fait bien semblant. Et il accepte. Il a lancé bien assez de perches pour insinuer que je devrais me reposer, de toute façon, alors s'il m'avait reproché de le prendre au pied de la lettre j'aurais pas compris où il voulait en venir. Pas que je prétende comprendre grand-chose au bonhomme cela dit. Des fois j'ai l'impression que c'est parce qu'il y a rien à comprendre. Qu'il est vide. Comme s'il avait oublié quelque chose dehors, avant d'arriver ici. Et puis des fois il s'allume et il redevient vivant. Et il a même des expressions, comme par exemple un sourcil levé. Je l'ai surpris. J'en suis pas fâchée, c'est rassurant quelque part qu'il s'intéresse assez à son environnement pour en arriver là. Et qu'il réagisse pas mal à la mention de cette fleur.

    "Oh, beaucoup."

    C'est une jolie musique, qu'il joue. C'est calme. C'est presque machinal. Et c'est moi qu'il regarde. Je serre un peu plus fort le pouf-coussin entre mes jambes et moi, pour mieux m'installer.

    "Il y avait..."

    Je m'interromps, comme si je cherchais quelle fleur décrire. C'est surtout que je me demande brusquement si je devrais lui parler des fleurs de Lubumbashi ou de celles de Sofia.

    "...il y avait le ngai-ngai." je murmure finalement.

    Lubumbashi. Au fond quelle importance. Même si quelqu'un attendait derrière la porte à moitié ouverte, ou simplement s'il posait la question avec malice, il ferait quoi de ce nom, de toute façon ? Et puis elle pousse sur la moitié de l'Afrique au moins, cette fleur. Je reprends à voix basse, juste au-dessus du murmure, comme une confidence :

    "C'est une fleur ronde, avec de gros pétales très fins, un peu fripés, on voit le soleil à travers. Un peu en forme de cornet, très évasé. Elle est grosse comme ça à peu près vous voyez ?" Je montre un cercle d'une petite dizaine de centimètres. "Elle est rose en général, parfois jaune, ça va du très pâle presque blanc au plutôt soutenu, rose presque rouge ou jaune presque vert. Avec toujours un cœur très net, rouge très foncé, presque comme du sang. Parfois c'est toute la fleur qui est rouge ou rose sombre. Avec un gros pistil touffu au milieu."

    J'hésite à continuer. C'est pas très clair comme description je crois.

    "On l'appelait aussi roselle, oseille de Guinée, ou des fois hibiscus, je sais pas si ça vous parle davantage ?"

    Peut-être. C'étaient surtout les Blancs que j'entendais s'extasier sur les "hibiscus". Moi j'appelais ça ngai-ngai, comme Aurèle. C'est le nom lingala.

    "Avec les fleurs séchées, on fait une infusion qu'on appelle souvent ngai-ngai aussi, ou bissap. Ca ressemble un peu à de la grenadine, visuellement, mais au goût rien à voir. C'est acidulé, ça rappelle un peu les fruits rouges, mais très frais, un peu comme s'il y avait de la menthe." Pas que j'en aie mangé souvent, de mon point de vue c'est plutôt les fruits rouges qui ressemblent au ngai-ngai... "On peut aussi faire de la compote, de la confiture... et on mange les feuilles pour accompagner la viande ou le poisson, c'est acide mais bien accommodé c'est très bon. Elle soigne pas mal de choses aussi on dit, la tension... Mais moi j'aimais les fleurs."

    Des fois maman m'en mettait une dans les cheveux, j'aimais tellement ça.

    "C'était assez violent comme contraste, un ngai-ngai rose vif sur moi." je plaisante pour chasser la tristesse. La musique est pas exactement joyeuse, mais mon petit rire fera bien l'affaire. "Et vous ? De bons souvenirs avec les fleurs ?"
    Re: [Salle de Musique] Bis repetitas
    Mar 10 Déc - 11:33
    Odysseus
    Odysseus
    217
    [Salle de Musique] Bis repetitas X5ed
    43 ans
    Baguette, artefacts et enchantements
    Sang mêlé
    Nirimage
    Elemagie (Air)
    Instructeur
    https://rementor.forumactif.com/t109-odysseus-instructeurhttps://rementor.forumactif.com/t136-dans-la-pensine-d-odysseus
    Elle dit quelque chose. Quelque chose d’elle, comme un cadeau, avec un nom que je ne reconnais pas, une image inconnue. Le Ngaï-ngaï. C’est un mot aux sonorités étranges, que je ne comprends pas et dont j’apprécie l’impression sur la langue alors que je l’articule sans un bruit, mes mains seules accompagnant le récit qu’on me livre. La pivoine, habituellement si resserrée sur son cœur s’ouvre un peu alors que le sommeil la gagne. Les humains sont bien différents des vraies fleurs que la nuit referme. Je hoche la tête. Les autres noms me parlent. L’hibiscus mais il y en a tant de différentes. La Groselle. Bien. J’arrive à imaginer cette grosse fleur au pistil presque violent tant il est sanguin. Et puis, elle me retourne la question et, tout en jouant, je réfléchis. Le silence s’installe. Le silence des mots. La musique est toujours là. Lorsque je reprends la parole, je suis un peu rêveur.

    « Il existe, en Grèce, sur les flancs du mont Olympe, une fleur qui ne pousse nulle part ailleurs. Elle n’a pas un joli nom, elle n’est pas des plus belles, mais l’on dit que c’est de son nectar qu’est tiré l’ambroisie. Ses particularités physiques sont tenues secrètes pour éviter son massacre par les touristes mais nous savons qu’elle a de grandes propriétés magiques. Pourtant, elle ne ressemble pas à grand-chose, la Jankaea heldreichii. C’est une fleur à quatre pétales, séparés comme ceux d’un trèfle à quatre feuilles. Ses couleurs vont vers le mauve et le violet, avec des nuances de gris qui la font se fondre dans la pierre. Ses feuilles, vertes foncées, sont hautes et effilées. De profil, elle forme un cône avec, profondément enfoui en son cœur, un pistil noir couronné de jaune qui dépasse à peine. Une plante peut avoir d’une à trois fleurs, qui apparaissent à la fin du printemps. En été, elles se transforment en capsules de graines. Ce n’est pas la seule plante endémique à ce mont si étrange. Elle cohabite avec la Micromeria acropolitana, une plante vivace aux fleurs roses mais…celle-ci m’est spéciale. Il y a, en elle, comme un mélange d’ouverture et de timidité, quelque chose de profondément vivant. Car si elle son espace de vie est peu étendu, elle s’y trouve bien. C’est un trésor en pleine vue, que personne ne remarque, dont seuls certains sont au courant. Il parait qu’un jour, quelqu’un chantera la chanson des dieux et son pollen, porté par la musique, se répandra dans le monde. Et que c’est alors que l’époque des miracles et des héros refleurira. »

    Cette histoire était la préférée de ma petite sœur. Un jour, pour son anniversaire, je lui avais montré, en secret, les véritables fleurs cachées du Mont. Elle avait chanté alors une musique que j’avais composé pour elle, et qu’on avait appelé la chanson des dieux. Mais aucun héro n’était venu et ma sœur n’était plus. La tristesse est toujours aussi vive, malgré les années écoulées. J’ai comme l’impression qu’en partageant ce secret avec Pivoine, comme j’aurais voulu le faire avec ma fille si elle avait jamais vécu assez longtemps, quelque part, l’âme de ma sœur survit toujours…
    Re: [Salle de Musique] Bis repetitas
    Mer 11 Déc - 15:22
    Pivoine
    Pivoine
    246
    [Salle de Musique] Bis repetitas Badge_noir
    23 ans
    Intelligence
    Sang mêlé
    Demi-Vélane
    Intelligence
    https://rementor.forumactif.com/t182-pivoine-enroleehttps://rementor.forumactif.com/t185-bouquet-de-pivoines
    Ca aurait presque l'air de l'intéresser dis donc. Il répète, en silence, le nom familier qu'il aurait peut-être du mal à vocaliser, même lui, le musicien, parce qu'il y a des sons ni français ni anglais là-dedans. J'ai aucune idée de s'il y a des ng en grec. Il a dit qu'il était grec, au bord du lac. Et je m'en fous complètement, en fait, de savoir s'il y a des ng en grec. C'est pas comme si j'allais devoir parler grec un jour.

    Et puis il rompt le silence musical où mes pensées se sont perdues, et il parle. Il parle. Et il parle encore. Je sais pas si même pour parler des propriétés des cœurs de baguettes ou même de sa musique je l'ai déjà entendu autant parler. D'un coup. Sans pause. Sans question. Sans avoir l'impression que chaque mot est une souffrance. C'est tellement inhabituel que pour un peu j'en oublierais de suivre ce qu'il dit. Pour un peu. Un gros peu, même, et qui dure pas longtemps. J'écoute de toutes mes oreilles, le menton sur mon pouf, je le regarde, j'essaie d'imaginer les fleurs qu'il décrit. A l'entendre, il aime bien les petites choses anodines cachées en pleine vue. Ca me rappellerait presque quelqu'un, qui n'a rien à faire ici.

    Ca m'étonne pas qu'il ait l'air d'aimer l'histoire de cette fleur. Ca parle de musique. Ca ressemble à un conte. Je me sens sourire doucement. J'aime bien aussi. Je me demande s'il y a le moindre sous-entendu à y voir. Pas subtil il a dit mh.

    "C'est une belle histoire." je murmure quand il n'a plus l'air de vouloir ajouter autre chose. "Merci de l'avoir partagée." Parce que clairement, pour qu'il parle autant, c'était important pour lui. "Est-ce que vous croyez que quelqu'un chantera la chanson des dieux pour nous ?"

    Je demande ça un peu trop sérieusement, je m'en rends compte. C'est pas que je me prenne pour une héroïne, surtout qu'en général ces gens-là vivent pas très vieux et meurent pas dans leur lit... encore que je me vois ni grand-mère ni finir ma vie au calme... mais honnêtement j'aurais rien contre un ou deux miracles.
    Re: [Salle de Musique] Bis repetitas
    Mar 17 Déc - 12:08
    Odysseus
    Odysseus
    217
    [Salle de Musique] Bis repetitas X5ed
    43 ans
    Baguette, artefacts et enchantements
    Sang mêlé
    Nirimage
    Elemagie (Air)
    Instructeur
    https://rementor.forumactif.com/t109-odysseus-instructeurhttps://rementor.forumactif.com/t136-dans-la-pensine-d-odysseus
    La voix de la jeune femme me rappelle à la réalité et je suis presque surpris de voir devant moi l’enrôlée qui y était avant mon absence, et non ma sœur, ou ma femme, ou ma fille. Qu’à cela ne tienne, ce n’est pas grave. Le pincement au cœur que je ressens alors n’est pas nouveau. J’oublie souvent, ici, les horreurs de l’autre monde. Et puis, d’un coup, ils me reviennent en pleine figure. Une fois, deux fois, dix fois par jour. Le temps n’atténue pas la peine, il l’apprivoise. Elle devient alors familière, presque rassurante. Si je souffre, c’est que je vis, je suppose. Si je vis, alors leur souvenir perdure à travers moi. Et, maintenant, un peu à travers Pivoine qui a accepté de prendre une partie de cet héritage. Je ne fais pas attention au silence, j’ai besoin de temps pour réintégrer la réalité. C’est ainsi. Je baisse la tête.

    « Plus personne ne la connaît. » Que moi puisque je l’ai composée sauf que je ne la joue plus. Ce sont des légendes. Il n’y a pas de dieux, pas de héros, pas de miracle. Le mal ronge le monde. Certains hommes tentent de lui barrer la route. Ils ne sont que des hommes. Combien de ces enfants que l’on élève pour se faire abattre verront les lendemains dont ils rêvent. Bien peu. Je ne devrais pas penser tout ça. Mon rôle est de les former et de leur donner les armes pour faire reculer l’intolérance. Je n’y crois pas. Pas vraiment. Mais je n’ai pas le choix. Je dois faire de mon mieux. C’est ce que les femmes de ma vie auraient voulu. Je ne dois pas rester sur ce défaitisme. La jeune femme devant moi a besoin d’espoir.

    « Mais si nous remportons le combat, alors d’autres chansons seront composées et aucun de vous ne sera oublié, c’est certain. »

    Je ne suis pas sûr qu’elle recherche la gloire, Pivoine. Elle est trop secrète pour ça, perce-neige timide sous la glace. Je n’ai rien d’autre à offrir. Personne ne nous sauvera qu’eux-mêmes. Il est indispensable qu’ils en soient persuadés. Ils sont les héros de demain. Bien loin des histoires épiques de nos enfances.
    Re: [Salle de Musique] Bis repetitas
    Contenu sponsorisé

    Sauter vers: