Givre avait attendu sagement la journée, mais il était temps d’aller tester les eaux du lac. Avec chaussette, bien entendu.

"Allez Chaussette, c’est l’heure de la baignade !"

Armée de son inséparable ombrelle, Chaussette bien calé dans sa manche comme l’atout d’un magicien moldu, son carnet de révisions dans sa besace, Givre sortit de son dortoir d’un pas tranquille. Elle continuait de rattraper son fichu retard dans ses études avec un certain acharnement. Il lui semblait certains jours qu’elle n’arriverait jamais à rattraper ses camarades, mais il était hors de question d’abandonner. Histoire de se détendre, elle avait récupéré un ouvrage sur les habitudes des moldus. Pour cette petite sang-mêlée, c’était un tout autre monde qui s’ouvrait à elle. Les coutumes des moldus étaient tout simplement fascinantes.

Peut-être qu’un jour, elle aurait le courage d’aller interroger les autres sang-mêlé de l’académie, parmi eux un au moins ou une qui avait vécu entouré de moldus et qui les connaissait. Parfois, elle essayait d’imaginer ce qu’aurait été sa vie si elle était restée auprès de sa mère. Malheureusement, elle n’avait pas assez de souvenirs de cette période, ni de connaissance sur les moldus pour mener bien longtemps cette rêverie.

En attendant, elle était arrivée au bord du lac. AVce d’infinies précautions, elle choisit une large pierre plate sur laquelle elle s’installa. Elle ôta d’abord ses chaussures ce qui lui enleva 6 bons centimètres de haut. Elle ôta ensuite ses grandes chaussettes noires qu’elle enfonça dans ses chaussures histoire de les préserver de l’eau. Enfin, elle desserra sa manche et trempa ses petits pieds dans l’eau. Tout doucement, Chaussette pointa sa tête et se laissa glisser le long de son bras, avant de s’enrouler autour de sa jambe, tel un ruban de soie. Elle souri en voyant son petit compagnon glisser dans l’eau avec grâce. Avec un peu de chance, il pourrait trouver de quoi dîner, sinon elle ferait un petit détour par les cuisines.

Comme il était doux de glisser ses petits pieds dans une eau fraiche pendant que le mouvement de Chaussette faisait des ondes à la surface. Givre s’absorba tranquillement dans la lecture de ses révisions. Autour d’elle, le silence et le calme.

Jusqu’à ce qu’un bruit attire son attention. Tout en levant la tête, elle lança l’avertissement d’usage.

-Pas d’inquiétude pour le serpent, il n’est pas dangereux du tout.

Par précaution, ce dernier était revenu s’enrouler autours de la cheville de Givre, juste au cas où. Préférant ne pas trop faire étalage de son talent de Fourchelang, qui avait une certaine tendance à mettre très mal à l’aise ses interlocuteurs, Givre ne lui dit rien pour l’instant. Si elle sentait une quelconque inquiétude émanant du reptile, elle prendrait les choses en main immédiatement. Mais pour l’instant, rien ne servait de se mettre en alerte. C’était une belle journée, dans un beau cadre, et une simple rencontre. Pas de quoi s’inquiéter.

Première journée. Première journée complète au domaine. Se réveiller tôt pour aller courir, enchaîner des cours, sans vraiment savoir où ils se trouvaient. Chercher son chemin. Sourire. Ecouter. Apprendre. Déjeuner avec les autres enrôlés. Seule. Presque 12h d'exercices, de bruit, d'agitation. 12h à se montrer aimable, à rire aux plaisanteries, à remercier les instructeurs, à enregistrer une quantité monstrueuse de nouvelles informations, à allonger la liste des devoirs à rendre. Elle était vidée. Et ce n'était que la première journée. Demain serait l'écho d'aujourd'hui. De même que les jours qui suivraient.

C'était l'heure du dîner mais elle ne se sentait pas de retourner dans le réfectoire. Elle voulait fuir la foule. Elle avait besoin de calme, de silence. De s'isoler. Son estomac attendrait. Elle alla donc à contre sens du reste de ses camarades et se promena aux abords de la prairie. Plus elle marchait, plus le tumulte du château s'étouffait. Enfin. Ses pas la conduire naturellement jusqu'aux abords du lac. L'idée de se laisser bercer par les balancelles face au crépuscule qui embraserait l'étendu d'eau immaculée la séduit assez.

C'est à ce moment qu'elle remarqua une silhouette qui occupait les lieux. Quelques pas plus tard, elle la distinguait suffisamment pour la reconnaître. Petite, les cheveux ivoire. La jeune femme faisait partie de sa brigade. Elle l'avait vu la veille dans la salle commune, croisée à la salle de bain. Cependant, elle ne croyait pas avoir partagé de cours avec elle jusqu'à présent. C'était une jeune femme qui lui semblait intrigante. On aurait dit qu'elle vivait dans un monde à part. Elle était là mais paraissait ailleurs. Et la froideur de son regard éveillait l'envie d'en savoir plus sur l'histoire qu'il cachait.

Tant pis pour le calme et la solitude. Après tout, un peu de compagnie était peut-être un atout sur le long terme. Histoire de rendre les journées moins monotones. Moins pesantes. Pour autant, elle ne voulait pas s'imposer. Après tout, il était fort probable que la fille aux yeux de glace cherche elle aussi un peu de tranquillité.

Quand une brindille craqua sous ses pieds, la co-brigadière releva la tête et lui adressa la parole. Écume remarqua ses pieds nus immergés. Cela ne la surpris pas, au contraire. Elle même ne se serait pas faites prier pour l'imiter. Elle remarqua également le reptile avec lequel elle l'avait vu précédemment. A croire qu'elle ne s'en défaisait jamais. D'ailleurs, les paroles de son interlocutrice concernait l'animal et se voulaient rassurantes, anticipant une peur nullement ressentie.

"Désolée", dit-elle en guise de réponse. Restant à distance pour ne pas s'imposer. "Je pensais que la place serait libre à cette heure-là. Je ne veux pas te déranger, je vais aller plus loin."