Dans les serres du Domaine, le temps semble avoir une emprise floue. D'un côté, les heures de la journée y rythment la vie avec le cycle quotidien des fleurs et plantes ainsi que celui de la lumière. De l'autre, une heure passée ici peut sembler durer une simple minute ou encore une éternité. Althariaa aime cet espace étrange, à la fois hors du temps et imprégné de celui-ci. C'est ici qu'elle se sent le plus à l'aise, le plus elle-même aussi. Il s'agit également, et de loin, de son endroit favori du Domaine.

Néanmoins, malgré le fait qu'elle se trouve présentement dans l'une de ces petites serres où elle s'est isolée pour travailler, l'apaisement qu'elle y trouve normalement n'est pas au rendez-vous. Alors qu'elle travaille sur son projet, Althariaa doit sans cesse s'ordonner d'arrêter de douter et de juger son idée comme ridicule. Son angoisse et ses incertitudes l'agacent profondément et la jeune femme pousse un soupire de frustration avant de froncer les sourcils, déterminés à se concentrer sur sa tâche.

La sorcière attrape donc une nouvelle petite branche de bois séchée spécialement sélectionnée au préalable et la pose sur la pièce qu'elle construit. Avec un peu de magie, elle fusionne les bouts de cette branche à ceux des autres déjà montée, terminant ainsi la dernière des deux pièces principales de son mobile. La forme finale ressemble à deux pyramides à base carrée dont les bases auraient été collées ensemble, les branches formant les arrêtent, laissant ainsi vides les surfaces du solide.

Ses mains s'affairent ensuite à sortir de son sac un tissu soigneusement plié dans lequel se trouvent de petites pièces de verre polies aux formes diverses. Elle sait finalement encore peu de choses sur la personne à qui elle veut offrir ce présent, mais elle sait qu'il a été pêcheur, dans une autre vie. Aussi, lorsqu'elle a cherché les bons objets pour composer son mobile, Althariaa a aussitôt pensé à du verre coloré dans les teintes de bleu et vert, pour rappeler l'océan. Un passage dans les divers débarras du Domaine ainsi qu’à la forge lui a rapidement fourni ce qu'elle cherchait. Du bout de sa baguette, la jeune femme s’emploie alors à graver minutieusement un petit trou au centre de chaque morceau.

Une fois cette tâche terminée, c'est l'heure de l'assemblage. La pièce est simple, mais agréablement balancée. Un morceau d'écorce aussi long que son avant-bras sert de base. À celui-ci pend les deux pièces géométriques qu'elle a confectionnées, rattachée par les de fines cordes quasi transparentes serties de morceau de verre coloré à différents endroits. La touche finale qu'elle apporte à son projet sont deux petites plantes aériennes qu'elle insère doucement dans les cadres de bois.

La Marocaine accroche finalement son oeuvre à un support normalement dédié aux plantes en germination, puis se recule pour observer le résultat. Elle est relativement satisfaire, mais l'impression d'être bête reste collée au fond de son esprit. Et s'il n'aimait pas le mobile? S'il trouvait sa confection enfantine, risible? S'il ne comprenait à tort ses intentions? Althariaa claque alors de la langue avec agacement et se passe les deux mains dans les cheveux, repoussant ainsi son imposante tignasse frisée vers l'arrière. Elle souhaite simplement lui dire merci pourtant. Merci d'avoir été là, de l'avoir rassuré, de l'avoir empêchée d'être seule... Rien ne devrait être compliqué là-dedans. Non?